Le Parlement européen vote pour la fin des voitures à combustion

Fabrication de moteurs
Si le Parlement et les États de l’UE se mettent d’accord sur une interdiction, les nouvelles voitures à combustion pourront encore être mises sur les routes pendant 13 ans. (Source : IMAGO / Jochen Eckel)

Le Parlement européen a mis en place une interdiction de vente des véhicules à combustion à partir de 2035. Avec une majorité de 339 voix contre 249, les députés européens se sont prononcés mercredi à Strasbourg pour qu’à partir de 2035, les constructeurs ne puissent plus mettre sur le marché que des voitures et des camionnettes qui n’émettent pas de gaz à effet de serre nuisibles au climat. Une partie du lobby industriel et des députés conservateurs avaient fait pression au préalable pour que l’objectif soit fixé à 90 pour cent de réduction des émissions au lieu de 100 pour cent.

Les organisations environnementales ont en revanche salué le résultat plus conséquent. « Aujourd’hui, le Parlement européen a donné un signal clair en direction d’un changement de propulsion », a déclaré Jens Hilgenberg, responsable de la politique des transports chez l’organisation non gouvernementale allemande de défense de l’environnement BUND. Le moteur à combustion serait un modèle en voie de disparition, et cela devrait être clair pour tous les participants. Le Nabu (Naturschutzbund Deutschland, un syndicat allemand de conservation de la nature et de la biodiversité) déclare : « La fin des moteurs à combustion dans l’UE en 2035 est à la fois un grand pas et une mission de travail ». Le gouvernement fédéral allemand devrait maintenant prendre des mesures urgentes pour que l’objectif soit atteint.

Le vote a porté sur les propositions de la Commission européenne qui doivent contribuer à réduire les émissions de gaz à effet de serre nocifs pour le climat de 55 % d’ici 2030 par rapport à 1990 et à rendre l’UE climatiquement neutre d’ici 2050. Ces plans font partie du paquet climatique "Fit for 55".

Pour que l’interdiction puisse entrer en vigueur, les Etats membres de l’UE et le Parlement européen doivent maintenant se mettre d’accord dans une dernière étape. De nombreuses propositions ont déjà fait l’objet de controverses et pourraient encore être édulcorées. Les Etats veulent définir leur position d’ici la fin du mois.

En Allemagne, les Verts et le SPD (parti social-démocrate) ont salué la démarche. Mais le FDP (parti libéral-démocrate) insiste pour que des changements soient apportés.

Pas de mesures de survie

Selon un rapport de l’Agence européenne pour l’environnement, le transport était responsable d’environ un quart des émissions totales de CO2 de l’UE en 2019. Sur ce total, près de 72 % étaient imputables au transport routier. Le transport est le seul domaine dans lequel les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté au cours des trois dernières décennies ; de 33,5 pour cent entre 1990 et 2019.

C’est pourquoi le Parlement souhaite que les valeurs limites pour les voitures et les camionnettes soient réduites à zéro. Comme il n’est pas prévu de prendre en compte les carburants synthétiques, alias les e-fuels, cela signifierait la fin des véhicules à combustion. En principe, un véhicule à combustion classique pourrait fonctionner avec ces carburants sans impact sur le climat, mais de manière très inefficace du point de vue énergétique. De plus, les capacités de production font actuellement encore défaut.

Le député CDU (Union chrétienne-démocrate d’Allemagne) Jens Gieseke – tout comme l’association de l’industrie automobile et une partie du FDP – s’est néanmoins prononcé en faveur de la possibilité d’utiliser ces carburants controversés pour les voitures et les camionnettes.

Le député des Verts Michael Bloss s’y est opposé : « Si nous déversons les e-fuels dans les réservoirs des voitures des citoyens, ils manqueront pour les bateaux et les avions, où nous ne savons déjà pas où les trouver ».

La crise climatique ne laisse aucune place aux voitures à combustion

L’Agence fédérale allemande pour l’environnement estime qu’une interdiction de vente de voitures neuves à moteur à combustion à partir de 2035 est nécessaire pour pouvoir atteindre les objectifs climatiques dans le domaine des transports. Si des voitures à moteur à combustion sont encore mises sur le marché après 2035, la neutralité climatique ne pourra pas être atteinte d’ici 2045, a déclaré le président Dirk Messner.

Greenpeace a rappelé que le gouvernement allemand voulait lui aussi, selon l’accord de coalition, supprimer progressivement les véhicules à combustion en 2035. Tobias Austrup, expert en transport chez Greenpeace, fit le commentaire suivant : « Pour cela, [le ministre des Transports] Volker Wissing doit rapidement introduire une taxe sur les nouvelles immatriculations qui accélérera la montée en puissance de la mobilité électrique ». Ce ne serait qu’ainsi que les transports pourraient respecter leurs objectifs climatiques et que le secteur automobile allemand pourrait s’armer pour la transformation qui s’annonce.

Pour la Deutsche Umwelthilfe (DUH, une organisation allemande à l’aide de l’environnement), la mise en œuvre n’est pas assez rapide ; elle demande l’arrêt des véhicules à combustion déjà dès 2030. Le directeur fédéral Jürgen Resch a déclaré mercredi : « L’escalade de la crise climatique ne nous laisse pas le temps de mettre encore 13 ans de plus des millions de nouvelles voitures à combustion sur les routes européennes, qui dépendront à leur tour pendant 15 ans ou plus de l’essence nuisible au climat ».

Le mouvement de protection du climat Fridays for Future a revendiqué la décision du Parlement européen comme un succès de son travail. Mais l’année 2035 visée serait « dix ans trop tard » pour atteindre l’objectif de limiter le réchauffement de la planète à 1,5 degré Celsius par rapport à l’ère préindustrielle, comme convenu en 2015 lors de la conférence des Nations unies sur le climat à Paris, ont écrit les activistes sur Twitter.. « Il est clair que nous ne parviendrons pas à un tournant dans les transports en mettant des voitures électriques sur les routes, mais grâce aux gens qui descendent dans la rue. »

Le groupe VW a salué la sécurité de planification qui accompagne la décision politique d’abandonner les véhicules à combustion. « Le tournant vers l’électromobilité est irréversible », a fait savoir le constructeur. Mercedes-Benz a également exprimé son approbation de la décision du Parlement.

Le syndicat allemand des ouvriers de l’industrie métallurgique IG Metall a demandé un soutien pour les employés concernés de l’industrie automobile. « Le vote en faveur de l’abandon des véhicules à combustion est un engagement volontaire de la politique à tous les niveaux », a averti Jörg Hofmann, premier président d’IG Metall. « Elle doit maintenant créer à toute vitesse les conditions-cadres pour que cet objectif soit réalisable ». Le syndicat a appelé à un développement des infrastructures de recharge et des énergies renouvelables à l’échelle européenne.

L’extension du système d’échange de quotas d’émission a échoué

Le Parlement a rejeté d’autres propositions de la Commission européenne sur la protection du climat. Entre autres, la réforme du système d’échange de quotas d’émission n’a pas été approuvée. En fait, le système devait être étendu aux bâtiments commerciaux et au transport commercial à partir de 2025. Mais les conservateurs et la droite avaient tenté d’affaiblir les propositions par des amendements. Les sociaux-démocrates et les Verts ont alors rejeté l’ensemble des projets de loi.

Le projet de loi a été renvoyé à la commission de l’environnement. Celle-ci doit élaborer un compromis qui a des chances d’obtenir une majorité au Parlement.

L’échange de quotas d’émission est au cœur de la politique climatique de l’UE. Il régule le montant à payer pour les émissions de gaz nocifs pour le climat comme le CO2. En Allemagne et dans d’autres pays de l’UE, les bâtiments et les transports font déjà partie du système d’échange de quotas d’émission.

Les producteurs importateurs exemptés jusqu’à présent

Un mécanisme de compensation proposé pour les émissions de CO2 des constructeurs étrangers a également échoué face au vote du Parlement. Celui-ci aurait été calculé sur la base des émissions de CO2 lors de la production et aurait dû tenir compte des chiffres de compensation déjà payés dans le pays de fabrication.

Le mécanisme devait assurer l’égalité de concurrence entre les constructeurs et les importateurs européens. Parallèlement, il devait inciter d’autres pays à introduire également des mesures climatiques plus strictes.

Au vu des propositions rejetées, Rasmus Andresen, porte-parole des Verts allemands au Parlement européen, a parlé d’un « jour noir pour la protection du climat ». (dpa / hcz)